Dora

J’ai connu Dora à Strasbourg. Une fois, quand on a pris le café, comme si elle avait apporté avec elle Londre, Paris, NY, Sidney ; car elle dégage une atmosphère et le monde entier, les métropoles, étaient au RDV avec elle, avec nous, dans un piccolissimo nascosto café d’une ville post-socialiste comme Z.

J’ai appris beaucoup d’elle. La sagesse l’habite. Celle intellectuelle et la sagesse de la vie. C’est la classe, diraient les français. D’une certaine manière, elle regarde la vie différemment. Elle est écrivaine. C’est rare de rencontrer une personne comme elle. Lors de nos rencontres, nous ne prenions que du café.

Elle est forte et ne se plaint pas. L’égoïsme l’abhorre. Elle a survécu ce socialisme.

Lorsqu’elle parle, par ses images linguistiques, elle crée des images. Son père était peintre.

Dora n’aimait pas Strasbourg.

Elle possède l’ironie et l’autoironie.

Elle m’avait recommandé des livres formidables. Une fois elle m’avait dit quelque chose de très beau sur moi-même . Elle l’avait dit en langue littéraire, par des mots qui sont rares dans la langue parlée alors je n’étais pas en mesure de les répéter mais j’ai senti que c’était quelque chose de beau. On se rencontrait lors des soirées littéraires, les siennescomme celle des autres.

En fait, je suis souvent en dialogue avec elle. J’aimerais bien qu’elle habite plus près.

Maintenant je suis ici et ma tâche est peut-être d’être pour les autres ce qu’elle avait été pour moi. Qui sait, j’essaie peut-être de transmettre aux autres le message qu’elle avait transmis à moi.

Dora n’aime pas le rude de la Dalmatie, elle aime la douceur de Kvarner. Elle estime qu’il ne faut pas être trop popustljiv envers les enfants.

Moi j’ai sympathisé Dora car elle est différente. Elle n’est pas snob et la diplomatie ne l’impressionnait guère, comme ni moi-même.

Elle aime l’Egypte et la Grèce. Plusieurs fois elle m’a remercié de l’avoir rappelé par mes emails et mes cartes quelques souvenirs (p.ex. de Giorgio de Chirico ou les chr étiens d’Orient).

Je lui ai envoyé de nombreuses cartes de Paris, de Toulouse. « Je possède déjà une véritable petite collection », me l’avait-elle dit.

Elle regarde la vie les yeux d’un écrivain. Je me sens heureuse et privilégié que la vie m’avait offert les rencontres avec elle.

Elle était l’une de mes professeurs. L’una delle mie maestre. Une fois je lui aiu envoyé la carte postale avec l’image d’Emmaus de Rembrandt- c’était un hasard. Et pourtant elle m’avait dit que cette image-là représente son tableau préféré !

Elle me manque cruellement ici à Rijeka. Mais peut-être c’est à moi le tour de transmettre ce message.

La café pris avec Dora est le dépaysement total ! L’esprit s’échappe.

Mes professeurs m’ont offert en cadeau ce minimum « sognante », rêveur, ô combien important.